Le
Baron PESCHART d'AMBLY,
le premier d'entre eux, venait de Bône, où il avait exercé un mandat
d'autorité comme chef de la milice et il avait assumé les mêmes fonctions
à Philippeville, il était donc naturel que le pouvoir royal lui confie
une mission de "police municipale" destinée à assurer l'ordre public,
dans une agglomération qui réunissait spontanément des gens de toutes
nationalités, Italiens, Suisses, Allemands, Maltais, Espagnols et
bien sur : Français, tous attirés par la perspective de gagner leur
vie dans un pays neuf.
Nommé en 1843
le nouveau Maire doit, en 1848, assumer la police de 4 603 Européens
auxquels s'ajoutent 300 musulmans et 80 juifs ces derniers décomptés
à part à raison de leur statut.
Le 1er mai 1851 le Baron d'Ambly reçoit la légion d'honneur.
Il meurt le 2
mai 1857 et il est remplacé, le 24 août, par Monsieur Adolphe O'WALLET
lui aussi ancien commandant de la milice de
Constantine. En l'installant dans ses fonctions le Sous-préfet
souhaite la construction de bornes fontaines, l'achèvement
du réseau d'égouts et du système d'éclairage public ainsi que la réalisation
du Collège.
C'est Monsieur
Lucien TEISSERE,
négociant qui lui succède le 12 septembre 1870 … soit 13 ans après.
Mais la période
est tumultueuse, car c'est la fin de l'Empire et c'est un Capitaine
en retraite qui va remplacer Monsieur O'WALLET, au moins pendant une
année : Monsieur Jules RIONDEL.
Un Philippevillois
de souche va lui succéder :
Théophile REGUIS.
Il est né à Marseille, mais il est négociant dans
la cité et son mandat durera trois années jusqu'au 16 mars 1874.
Il sera à nouveau maire, de 1882 à 1884, et les Philippevillois se
souviennent qu'une rue importante de la ville (l'ex rue des Numides),
a longtemps porté son nom.
Monsieur Adolphe O'WALLET
va réapparaître pendant deux ans (1874-1876)
Alphonse LHOTE
Architecte prend sa suite durant une année (1876-1877)
Il sera remplacé
par Alexandre RICOUX,
courtier maritime, du 12 mars 1877 au 23 janvier 1881.
Avec Alexandre RICOUX c'est l'activité du port, nouvellement
créé, qui s'installe à la mairie. Mieux encore c'est la génération
née en Algérie, qui entre en lice car Alexandre RICOUX est né à Bougie.
Ferdinand VELLARD,
qui lui succède de 1881 à 1882 est avocat défenseur et avec lui entre
à la mairie une série de juristes qui régnaient sur la commune
pendant des lustres.
De nouveau Théophile REGUIS
redevient Maire de 1882 à 1884 mais il laisse la place
pour six mois à Robert CALENDINI
avocat défenseur.
René RICOUX,
fils d'Alexandre, s'installera ensuite à la Mairie pour longtemps.
Docteur en médecine il vit au cœur de la population.
C'est un enfant de la cité ! Il sera maire du 13 décembre 1884 au
20 mai 1888.
A nouveau Ferdinand-Marie VELLARD
occupera le fauteuil municipal de 1888 à 1892.
René RICOUX
lui succède de 1892 à 1896.
C'est encore un
avoué, Lucien SIDER,
issu d'une famille suisse qui avait occupé une place importante dans
la cité, qui, de 1896 à 1900 occupera le poste de Maire. Il
venait d'avoir 25 ans !
Plus tard, en 1959, rendant visite à un de ses lointains successeurs
à la Mairie, il minimisera le handicap, en rappelant qu'il expliquait
à ses adversaires (qui le brocardaient sur son âge) qu'il se
guérissait chaque jour de ce défaut.
Il resta longtemps Conseiller général du canton de Philippeville ouest,
avant de devenir Avoué à Alger où il fit une brillante carrière.
C'est encore René RICOUX
qui, le 16 mai 1900, reprendra le fauteuil de Maire jusqu'au 14 mai
1904.
Albert TEISSIER,
banquier, lui succédera du 15 mai 1904 au 5 avril 1914, soit
pendant dix ans.
La guerre est
proche. C'est alors un jeune Avocat défenseur :
Octave PASSERIEU
(1914-1929 ) qui va avoir la charge de la ville au moment où le conflit
va éclater, sous le feu des canons du Goeben et du Breslau
qui bombardent la ville avant même que les hostilités soient proclamées.
D'Octave PASSERIEU,
les Philippevillois, conserveront le souvenir d'un homme de devoir
et de rigueur. Grave et érudit il conduit sa carrière de Juriste scrupuleux
et d'Édile attentif à tous les détails de la gestion municipale.
Respectueux de la volonté de ses parents il renoncera à un mariage
qu'il avait souhaité, mais il restera fidèle à celle qu'il aimait
dans la discrétion la plus grande.
Discret, il le sera dans sa gestion, car, élevé aux plus hautes charges
de la colonie il s'abstiendra d'en user pour sa ville, la privant
ainsi des subventions que d'autres utiliseront sans retenue. Délégué
Financier il siégera auprès du Gouverneur Général au "Conseil
du Gouvernement", audience où le pouvoir s'exerçait sans retenue.
Doué d'un talent oratoire de haut niveau, il étonnait les parlementaires
en visite, qui se déclaraient surpris de ne pas le voir siéger au
Parlement de la République où il aurait mieux fait valoir ses talents.
Ses administrés se désolaient parfois de constater que ses scrupules
les privaient de la manne financière qui eut embelli leur cité. Ils
avaient sans doute raison ainsi que l'exemple de son successeur le
démontrera.
A son décès en
avril 1929 c'est le sénateur Paul CUTTOLI
qui prendra sa suite, après une lutte héroïque contre un challenger,
jeune et énergique, le pharmacien Henry DARUTY, lequel présenté comme
un homme de droite ne réussira pas à enlever la mairie.
Paul CUTTOLI
Paul CUTTOLI était avocat et sa renommée dépassait
les limites du département. Son talent oratoire, plus fleuri que celui
d'Octave PASSERIEU lui avait valu des succès prestigieux de Tunis
à Casablanca où il plaidait souvent.
Sénateur, il avait noué des relations très solides dans l'Administration
du Gouvernement Général si bien que peu de nominations, réalisées
dans le département, n'échappaient à son contrôle.
On devine que le Sénateur-Maire a pu faire pleuvoir sur la ville un
flot ininterrompu de subventions afin de rattraper le retard :
L'Hôtel de Ville
(un modèle du genre) ; une Gare moderne (à la place d'un hangar minable
et vétuste) ; un bel Hôtel des Postes ; une nouvelle agence de la
Banque de l'Algérie ; un agréable Syndicat d'Initiatives ; un nouvel
Hôtel de Police ; un Ensemble Sanitaire destiné aux miséreux à proximité
d'un Artisanat où fonctionnait une école de tapis ; l'adduction d'eau
grâce à une pompe installée dans le lit du Saf Saf ; mais surtout
une conduite d'eau qui amenait à la ville les eaux du barrage du Zardezas
(à 40 km au sud) ; l'aménagement de la place Marqué, ornement de la
cité.

Le kiosque à musique sur la
Place Marqué et l'Hôtel de Ville
Les fêtes se succédaient donnant
au visiteur l'impression d'un véritable renouveau.
Le mandat du Sénateur-Maire Paul CUTTOLI
simplement interrompu par une brève délégation spéciale durant la
Révolution Nationale (environ deux années) se poursuivit jusqu'à
sa mort, intervenue en 1949.
A ses cotés le Batonnier
Émile LEDERMANN
occupait les fonctions d'adjoint chargé
de la Culture, et, à ce titre il écrivit un ouvrage
sur la région de Philippeville qui est une somme irremplaçable
sur les origines de Philippeville et des communes qui l'entourent.
Son nom est lié à jamais à l'histoire de
notre cité.
Adjoint, Louis CORDINA,
Agent maritime, lui succéda de 1949 à 1953, période d'intérim, sans
relief particulier.
Un jeune journaliste,
à la plume alerte, Paul BENQUET-CREVAUX
fut porté à la Mairie. Déjà la révolte grondait en
Algérie et elle influença la gestion des communes, affrontées au mouvement
qui devait conduire à l'Indépendance de l'Algérie.
Plus question à ce moment là de réalisations importantes dans le domaine
du logement ou ailleurs.
Très vite des délégations spéciales furent mises en place dans toute
l'Algérie !
Il en fut de même pour Philippeville, dont les budgets primitifs et
supplémentaires n'avaient pu être votés depuis deux ans.
La délégation
de Philippeville fut confiée le 10 janvier 1957 à une équipe dirigée
par Roger ROTH,
Avoué près le tribunal de la ville.
Elle était composée de six Français de souche et de six Musulmans
qui exerçaient leurs activités à parité et qui purent réussir à dresser
les budgets, réduire les déficits et ramener le calme dans les esprits.
On se souvient
que la ville avait été secouée très gravement par les violences
de la funeste journée du 20 août 1955 qui avaient laissé des traces
indélébiles dans les deux communautés.
Après les journées
de mai 1958 et la mise en place d'un collège unique, les élections
de mai 1959, effectuées selon le régime de la proportionnelle, amenèrent
à la Mairie une municipalité, aux proportions inversées comportant
une minorité française et une majorité de Français musulmans.
Ce fut Roger ROTH
qui fut élu maire et Bourhandine GATTY premier adjoint.
Ce dernier avait été un compagnon de Ferhat ABBAS et il jouissait
de la considération de la communauté musulmane.
Marcel DUCLOS, père de l'auteur du présent site, était adjoint aux
sports et à la jeunesse.
A son actif la
nouvelle Municipalité put entamer de grands travaux :
Un Boulevard Front de mer, façade de la ville sur la mer et surtout
un immense programme d'habitations à loyer modéré (2 500 logements)
destiné à combler un vide cruel de logements, dans une ville passée
de 50 000 à 85 000 résidents. La mise en place d'un nouveau
réseau d'alimentation en Eau potable assura à la cité : 20 000
mètres cubes d'eau par jour, ce qui ne fut pas un mince progrès.
La persistance des combats de la guerre d'Algérie ne constituait pas
un cadre idéal pour les réformes mais la confiance qui régnait au
niveau de la formation municipale contribuait à une amélioration du
climat social.
Dans des élections cantonales c'est un adjoint au maire Monsieur YACONO
qui fut élu tandis que les élections consulaires portaient à la chambre
de commerce un ami de la municipalité : Monsieur CARBONNEL.
Enfin les élections
à l'assemblée Nationale portaient au parlement le Maire : Roger ROTH.
Il devait ensuite exercer les fonctions de vice-président de l'Exécutif
Provisoire mis en place pour administrer l'Algérie jusqu'à l'autodétermination.
Il fera enfin
partie de l 'Assemblée nationale Algérienne constituante.

Samedi 7 Avril 1962 - A Rocher-Noir, l'Exécutif Provisoire
s'installe
A la gauche de Christian FOUCHET, on reconnait Abderrahmane
FARÈS (Président),
Bernard TRICOT, Roger ROTH (Vice-Président)
A sa droite, Jean MANNONI (Délégué aux affaires
financières),
Abderrazak CHENTOUF (Délégué aux affaires administratives),
à l'extrême droite Charles KOENIG (Délégué
aux travaux publics)
L'indépendance
de l'Algérie devait faire de lui
le dernier maire Français de Philippeville cent dix neuf ans après
le Baron PESCHART d'AMBLY
